Life and Correspondence of David Hume, Volume I (of 2)


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(2.)

Monsieur,—La traduction de vos discours politiques est la premire que j'ai donne au public; et l'utilit que j'ai cru que ma patrie en pouvoit retirer, est l'unique motif que m'ait dtermin l'entreprendre. Je n'ose me rpondre que vous la trouverez telle que vous l'esprez. C'est moi vous demander votre indulgence pour les fautes que vous y trouverez, et vous prier de me communiquer vos remarques sur des notes que j'ai cru y devoir adjouter. Je vous promets de corriger avec soumission les erreurs que vos m'y ferez apercevoir. A la fin du 2d vol. j'ai donn une notice des meilleurs ouvrages Anglois que j'ai consults, sur les matires du commerce; j'ai hazard de porter mon jugement sur chacun de ceux dont j'ai parl. Je le rectifierai sur vos lumires, si vous voulez bien me les communiquer. Si j'en ai omis quelqu'un d'important, je vous prie de me le faire connotre, et de me dire vous-mme, qui tes un si excellent juge, ce que l'on en doit penser. J'enricherai la 2 Edition de tout ce dont vous voudrez bien me faire part.

A l'gard de votre histoire de la Grande Bretagne que vous m'annoncez, ce ne sera plus simplement comme votre admirateur mais comme votre ami Monsieur, que j'en entreprendrai la traduction, et je ferai de mon mieux pour qu'elle perde le moins qu'il est possible. J'aime votre faon de penser, et je suis familiaris avec votre stile; si la matire exige qu'il soit plus lev je tacherai d'y atteindre. Mais pour que je puisse entreprendre cette traduction avec succs, il faut s'il est possible, que vous retardiez Londres au moins d'un mois la publication de votre ouvrage, et que vous me l'envoyez tout de suite par la poste, address sans autre enveloppe Mr. Jannes, Chevalier de l'ordre du Roi, Controlleur Gnral des Postes Paris. Nous avons ici une foule d'crivains mdiocres, qui sans savoir ni l'Anglois ni le Franois mme, sont a l'afft de tout ce qui s'imprime chez vous, et qui l'aide d'un dictionnaire vous massacreront impitoyablement. On nous a donn ainsi plusieurs bons ouvrages, et entre autres la dissertation de M. Wallace dont [460]il n'est pas possible de supporter la lecture en Franois. Pour faire de pareille besogne, il ne faut pas beaucoup de tems ces Messieurs l. Ils travaillent vte, parce qu'ils travaillent fami potius quam fam. Si je n'ai pas du tems devant eux, je serai prvenu, et si je le suis, je serai oblig d'abandonner l'ouvrage. Je ne vous parle pas des traducteurs de Hollande qui sont encore plus mauvais s'il est possible. Cette fois-ci je veux faire un office d'amiti, je vous prie de me mettre porte de le bien faire. Vos discours Politiques vous ont, comme je m'y attendois, donn ici la plus haute rputation, ds que votre histoire parotra, un libraire la fera venir par la poste, et mettra ses ouvriers aprs, moins que vous ne m'accordiez la grce que je vous demande. Alors on saura que je la traduis, et je suis sr que ces messieurs me laisseront faire.

J'ai encore vous apprendre, monsieur, que le succs de vos Discours Politiques ne fait qu'augmenter tous les jours, et que tout retentit de vos loges. Nos ministres mme n'en sont pas moins satisfaits que le public. Mr. le Comte d'Argenson, Mr. Le Marchal de Noailles, en un mot tous ceux qui ont ici part au gouvernement ont parl de votre ouvrage, comme d'un des meilleurs qui ayent jamais t faits sur ces matires. J'ai t oblig de cder mon exemplaire un d'entre eux; ainsi je vous prie de m'en adresser un par la mme voie que je vous ai indique, la poste aprs que vous m'aurez envoy le I. vol. de votre histoire, d'autant plus que les additions et corrections dont vous m'avez fait part se rapportent la 3^e edition qui je crois se trouveroit difficilement a Paris.

(3.)

Monsieur,—Je vous avois promis, et je m'tois flatt de pouvoir consacrer mes veilles traduire aussi votre admirable Histoire de l'infortune Maison de Stewart. Les obstacles les plus puissants, ceux-mmes qui tent l'esprit cette libert sans laquelle on ne fait rien de bien, voyages, affaires, disgrces, maladies—tout s'est oppos l'excution d'un projet qui rioit si fort mon imagination et dont l'excution ne pouroit que me faire honneur.

A ce dfaut j'ai prt un de mes amis, homme d'esprit et laborieux, le premier volume que vous avez eu la bont de m'envoyer. Il l'a traduit et le rendra public au commencement de l'hiver prochain.

J'ai de mme que tous ceux qui savent ici l'Anglois, le plus grand empressement de lire votre second volume. J'en ferai le mme usage que du premier.

Je vous avois annonc que vos discours Politiques feroient parmi nous le mme effet que L'Esprit des Loix. L'vnement m'a justifi, non seulement ils jouissent parmi nous de cette haute [461]rputation qu'ils mritent, mais ils ont donn lieu un grand nombre d'autres ouvrages plus ou moins estimables et qui la plus part n'ont d'original que la forme. Vous en trouverez le catalogue la suite d'une troisime dition de ma traduction que je vais donner incessamment.

Il vient d'en parotre un qui fait ici un grand bruit, et que je n'ai garde de confondre avec tous ceux dont je viens de parler. Il est intitul, L'Ami des Hommes ou Trait de La Population. L'Auteur est un gnie hardi, original, qui comme Montaigne se laisse aller ses ides, les expose sans orgueil, sans modestie; il ne suit ni ordre ni mthode; mais son ouvrage, plein d'excellentes choses, respire le bien de l'humanit et de la patrie. Il prche l'agriculture, et foudroye la finance. Il combat votre systme sur le luxe, mais avec les gards levs la superiorit de vos lumires. Il m'a remis un exemplaire de son ouvrage, qu'il me prie de vous prsenter comme un tribut de son estime et de la reconnoissance qu'il vous doit, pour l'utilit qu'il a tire de vos Discours Politiques. Il ne demande pas mieux que d' tre clair et par la noblesse des sentiments et la politesse de la conduite. Je ne crains pas de le dire. L'adversaire est digne de vous. C'est Monsieur le Marquis de Mirabeau, qui est tel qu'il parot dans son livre—c'est dire un des plus extraordinaires des hommes qu'il y ait en quelque pays que ce soit. Je vous prie Monsieur de m'indiquer une voie sre pour vous faire parvenir son ouvrage.

(4.)

Dresde, le 25 Dec. 1754.

J'ai vu ici la traduction de vos Discours Politiques imprime en Hollande; elle ne se peut pas lire; vous souffririez vous, Monsieur, de vous voir ainsi dfigur. Le Traducteur quel qu'il soit ne sait constamment ni l'Anglois ni le Franois. C'est probablement un de ces auteurs qui travaillent la foire pour les libraires de Hollande, et dont les ouvrages bons ou mauvais se dbitent aux foires de Leipsig et de Francfort. Les bibliothques de ce pays ci sont remplies de livres Franois qui n'ont jamais t et ne seront jamais connus en France. Cette traduction passe ici pour tre d'un Mr. Mauvillon de Leipsic dont le mtier est de faire des livres Franois pour L'Allemagne, et d'enseigner ce qu'il ne sait—c'est dire, votre langue et la ntre. Ce qu'il y a de Saxons lettrs qui les possdent l'une ou l'autre, et qui s'intressent au bien de leur pays, connoissent l'excellence de votre ouvrage, me pressent de faire imprimer Dresde mme la seconde dition de ma traduction, et je pourrois bien me rendre leur avis. Je n'attends plus que [462]votre rponse pour me dcider. Quelque part qu'elle se fasse, je tcherai de faire en sorte qu'elle soit belle et correcte.

(5.)

Monsieur,—Il y a peu prs un an que notre commerce pistolaire a commenc, et j'ai grand regret que par des contretems de tout espce il ait t sitt interrompu. Vous m'avez donn trop de preuves de votre politesse pour que je ne sois pas prsent convaincu que vous n'avez reu aucune des lettres que je vous ai crites de Dresde, et que j'avois essay de vous faire passer par la voie de votre ambassadeur cette cour. Prt a quitter la Saxe, je vous crivis encor de Lepzic, pour vous rendre compte de mon sjour en ce pays, et vous dire que la dissipation o j'y avois vcu forcment, ne m'avoit pas permis d'avancer beaucoup dans la traduction de votre histoire de la malheureuse famille des Stuarts. J'ai depuis t en Hollande, et, comme je l'avois prvu j'ai appris qu'un de ces auteurs, qui travaillent la fois aux gages des libraires qui les employent, en avoit fait une de son cot, qui toit toute prte parotre. Vous pouvez aisment juger du dcouragement o une pareille nouvelle m'a jett. La manufacture des livres de Hollande fait rellement grand tort notre littrature Franoise. On y employe traduire un excellent ouvrage des gens qui ne seroient bons qu' travailler la fabrique du papier.




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